Renforcer la prévention contre le développement des moisissures dans les bâtiments et leurs conséquences sur la santé des populations
L’Anses publie ce jour les résultats de son expertise relative aux moisissures dans les bâtiments, qui constituent un enjeu fort de santé publique en raison de leurs effets avérés sur la santé respiratoire, de la part importante de logements concernés et de l’identification de groupes de population davantage susceptibles de développer des pathologies lorsqu’ils y sont exposés. Dans ses conclusions, l’Agence recommande de prévenir le développement des moisissures dans le bâti, d’une part, en renforçant la coordination entre les acteurs des secteurs concernés (construction, énergie, etc.) ainsi qu’entre les autorités et acteurs publics et, d’autre part, en améliorant l’information des occupants des logements. L’Agence recommande également de prévenir les conséquences sanitaires, notamment pour les populations les plus sensibles, par une évolution de la réglementation prenant mieux en compte le risque lié à l’exposition aux moisissures dans les logements.
Depuis plusieurs années, une attention croissante est portée aux effets de la pollution des environnements intérieurs sur la santé. L’Anses a été saisie par les ministères chargés de la santé et de l’environnement afin de conduire une expertise sur la problématique du développement des moisissures et la production associée de mycotoxines dans les bâtis.
Les travaux de l’Anses
L’expertise menée par l’Agence confirme l’existence d’effets avérés sur la santé respiratoire liés à l’exposition aux moisissures. Ces effets incluent, d’une part, le développement et l’exacerbation de l’asthme chez les enfants et les adultes exposés sur leur lieu de travail et, d’autre part, la rhinite allergique.
Ce travail a également montré que certains groupes de population sont davantage susceptibles de développer des pathologies lorsqu’ils sont exposés aux moisissures : les enfants dès leur naissance, les enfants et adultes asthmatiques, les individus prédisposés à développer plus facilement des allergies (atopiques) ou présentant une hypersensibilité, ainsi que les patients immunodéprimés ou atteints de pathologies respiratoires chroniques. Sont également concernées les populations potentiellement surexposées du fait de caractéristiques socio-économiques défavorables, comme la précarité énergétique ou une sur-occupation du logement.
Selon l’expertise, l’exposition aux moisissures dans les environnements intérieurs concerne une part importante des logements : entre 14 et 20% de logements en France présentent des moisissures visibles. Il existe par ailleurs des variations géographiques des espèces fongiques notamment associées aux caractéristiques météorologiques et climatiques qui peuvent avoir des influences au niveau local.
Ce rapport, qui s’appuie sur des connaissances issues d’une revue de la littérature scientifique, de consultations en France et au niveau international de différents organismes ainsi que d’auditions d’acteurs du terrain, a en outre permis de faire le point sur les multiples approches permettant de caractériser une contamination par des moisissures dans les environnements intérieurs. Les différentes méthodes ont été comparées et les intérêts et limites de chacune précisés.
Les recommandations de l’Anses
Faisant le constat que le risque fongique constitue un problème fort de santé publique, l’Agence recommande :
1 - de mieux prévenir le développement des moisissures dans le bâti, par :
- un renforcement de la coordination entre les acteurs des secteurs d’activités concernés (construction, énergie, etc.), ainsi qu’entre les autorités et acteurs publics, afin d’améliorer la gestion des risques. Il s’agit notamment de mettre en place des actions de formation et d’information pour sensibiliser l’ensemble des professionnels impliqués dans les opérations liées aux bâtiments (conception, construction, rénovation et remédiation) à la problématique des moisissures ;
- une meilleure information des locataires et propriétaires sur les mesures efficaces de prévention du développement des moisissures dans l’habitat et sur les acteurs susceptibles de les conseiller et les aider dans cette démarche. Des campagnes d’information sur la qualité de l’air intérieur ou des animations au niveau des territoires pourraient par exemple être mises en place.
2 - de prévenir les conséquences sanitaires des expositions aux moisissures, en particulier par une évolution de la réglementation relative à l’habitat, afin de prendre en compte spécifiquement les risques liés à ces expositions. Il s’agit notamment :
- d’encadrer les actions à conduire par l’instauration de seuils de contamination par les moisissures (ex : estimation de surface moisie), l’objectif étant de prévenir ou de remédier à leur développement ;
- d’améliorer le recueil et le traitement des signalements relatifs au développement de moisissures dans le bâti rapportés par les occupants.
Ces actions devraient être prioritairement mises en place pour les groupes de populations à risques identifiés.
L’Agence encourage enfin la réalisation d’études, afin d’améliorer les connaissances sur la situation française, sur les effets sur la santé et dans le domaine des sciences humaines et sociales.
Que sont les moisissures ?
Le terme « moisissures » fait référence aux taches apparaissant dans l’habitat (notamment sur les murs et les plafonds), correspondant à un état avancé de développement de champignons microscopiques. Des conditions favorables sont nécessaires à leur développement dans les environnements intérieurs, notamment l’humidité dans différents éléments du bâti (cloisons, matière isolante, faux plafonds, etc.). Les moisissures produisent des spores, qui, une fois libérées, se retrouvent en suspension dans l’air et assurent la dispersion des moisissures. Elles sont également capables de synthétiser des substances chimiques, appelées mycotoxines, libérées dans l’air.
Le développement de moisissures dans les environnements intérieurs dépend notamment d’enjeux techniques en lien avec le bâti, comme la ventilation, l’isolation et le chauffage sur lesquels il convient d’agir de façon globale. Ces enjeux sont particulièrement sensibles dans le cadre de la recherche d’une plus grande efficacité énergétique des bâtiments. Les phénomènes touchant la structure du bâti (par exemple les ponts thermiques et remontées capillaires) ou le système de ventilation, ainsi que la vulnérabilité des matériaux, peuvent être à l’origine de moisissures.